Graver le territoire. René Derouin

Entre territoire physique et territoire intérieur.

Derouin, un géoartiste selon Henri Dorion, est un artiste du territoire et des cultures qui s’y inscrivent. La géographie est la première composante de ses recherches. Homme de terrain, fasciné par la Terre, il la parcourt, la sonde, la reproduit, l’invente et la réinvente dans sa forme, dans ses lignes. Séduit par sa force et sa puissance, il en saisit intrinsèquement la nature et en examine les mouvements tectoniques et les grands bouleversements dans le temps. Ses œuvres parlent de territoire mais aussi d’espace et de temps.

Parallèlement au territoire mais intimement lié à celui-ci, émerge de ses oeuvres, le lieu. Lieu historique, lieu du peuple, celui qui nous ramène au lieu intérieur, à notre culture propre, à ces territoires qui ont marqué de leur empreinte indélébile nos jours et nos pas. Migrations, installation de 20 000 figurines humaines en céramique illustre cette interpénétration. Ainsi, ces milliers de figurines, comme une marée humaine, un mouvement terrestre, se meuvent et se déplacent, se moulent aux grands mouvements terrestres, les miment tout en leur donnant une vie, une intériorité et une douleur que le territoire seul ne possède pas. L’humain devient partie intégrante du territoire. Il est territoire. (Fleuve Mémoire). Cette préoccupation constante de l’interaction du lieu intérieur et du lieu extérieur se retrouve également dans les symposiums d’art in-situ où Derouin invite l’artiste à marquer de son empreinte le territoire, poursuivant et prolongeant ainsi sa propre réflexion.

 

L’âme d’un continent, l’Amérique du Nord.
Gravé au cœur par le Mexique qu’il découvre dans les années 1950, René Derouin y puisera une grande partie de son univers artistique. L’art mexicain, la force d’expression de celui-ci et le rôle de l’artiste dans la société l’inspirent. Il s’en nourrit et y retourne régulièrement durant toute sa vie. Le tremblement de terre de 1985 à Mexico constitue un tournant décisif de son œuvre en ce qu’il ouvre grande la brèche à l’espace intérieur. Son voyage aux États-Unis, qu’il parcourt longuement, lui permet d’absorber tant les différences culturelles que cet espace aux proportions démesurées.

La nordicité et le grand nord québécois enracinent sa vision géologique de l’univers et son intérêt pour le territoire. La taille des paysages, leur vastitude l’habitent. De cette rencontre, il produira plusieurs murales à panneaux de grandes dimensions dont la Suite nordique, Nouveau-Québec et Taïga. En résonnance avec ce nord du nord québécois géologique, l’Islande le relie aux grands mouvements du début du monde : volcans, geysers, sources d’eau chaude. Il crée la série Équinoxe.

La «territorialité esthétique» créée par Derouin, fruit de sa perception de la rencontre des grands mouvements du destin humain et des forces terrestres qui influent sur celui-ci, nous relie directement à l’âme de l’Amérique du Nord.

 

Les oeuvres récentes et expositions (2016- Rouyn Noranda mars renederouin-290x2902017)

« Avec LES DERNIERS TERRITOIRES, le public est invité à découvrir le processus de création de l’artiste à la lumière de ses migrations et des œuvres réalisées durant la période de 2000 à 2013. Il s’agit là d’une exposition majeure dans le cheminement de l’artiste  qui évoque, avec ces œuvres de papier et de bois reliefs, les étapes d’une démarche créative l’éloignant toujours loin de son atelier, que ce soit à Mexico ou Barcelone, à Puebla ou à Percé, ou encore à la baie de Johan Beetz sur la Côte-Nord. La décennie 2000 et le début de la suivante ont constitué une étape importante dans le renouvellement de son œuvre alors qu’il est revenu au noir et blanc, tout en approfondissant l’art des papiers découpés, tradition autant japonaise que mexicaine l’ayant marqué lors de séjours dans ces deux pays.

Les œuvres récentes de René Derouin poursuivent l’observation de la nature et de la société actuelle. À travers ses multiples migrations, il découvre la rapacité de notre époque. S’inspirant des oiseaux de proie, il crée des œuvres d’une grande densité dans une métaphore poétique sur l’agitation et la voracité de notre société. Ces oiseaux au regard perçant lui servent d’inspiration dans une suite d’œuvres inédites qui saisissent l’imagination. Derouin nous livre une réflexion préoccupante sur la société actuelle :  fragmentations, rapacité dans un monde en mouvement. » tiré du site officiel de René Derouin.

Pour plus d’information consulter le site personnel de René Derouin  et celui des Jardins du précambrien à Val-David  de même que ceux des galeries Michel Guimont à Québec et Jean-Claude Bergeron à Ottawa.